D'un château l'autre. Les « chambres obscures » de Sade et Pasolini - Aix-Marseille Université Accéder directement au contenu
Article Dans Une Revue La Voix du regard : Revue littéraire sur les arts de l'image Année : 2007

D'un château l'autre. Les « chambres obscures » de Sade et Pasolini

Résumé

Partons d'une hypothèse : dans Les Cent Vingt Journées de Sodome de Sade, l'affaissement des images et la réduction si caractéristique du texte à ce qui, à peine, peut finalement rester dit (des pronoms impersonnels, des esquisses de sévices, un décompte des survivants et des morts), l'impossibilité de communiquer les images et ce qui est à voir, l'interdiction progressive de l'image pornographique ou violente qui a fait couler tant d'encre apparentent le roman sadien au dispositif optique de la camera obscura. La chambre obscure, dont le principe est connu depuis l'Antiquité grecque, consiste à restreindre l'ensemble des rayons lumineux réfractés et émanant des objets d'un décor à l'aide d'une boîte noire dans laquelle est percé un trou unique : l'image inversée et renversée du décor situé face au trou se dessine alors sur un écran blanc interceptant la lumière dans la boîte. La chambre obscure a commencé d'envahir, avec le baroque, non seulement les arts visuels comme la peinture, mais aussi la pensée philosophique : Deleuze a, par exemple, longuement rappelé qu'il fallait y voir, sans doute, l'un des modèles des monades leibniziennes « sans porte ni fenêtre ». Sade connaissait-il, en 1785, la chambre obscure, cette même chambre obscure qui avait déjà fasciné Voltaire ou Rousseau ? Je prendrais ici le risque de le supposer, tant ce type de spectacle, à l'époque, est à la mode (la lanterne magique), et tant Sade, ainsi que le montre son théâtre injustement délaissé, s'est intéressé à la question de la représentation (par exemple, la mise en perspective selon plusieurs points de vue de l'intrigue de L'Union des arts). Deux siècles plus tard, c'est le même geste, par-delà des différences essentielles, que nous retrouverons dans le film Salò de Pasolini 1 , poursuivant à sa manière le mouvement sadien jusqu'à son ultime négation, réinterrogeant le paradigme de la chambre obscure à la lumière de son successeur moderne : le cinéma.
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Dates et versions

hal-02068417 , version 1 (14-03-2019)

Identifiants

  • HAL Id : hal-02068417 , version 1

Citer

Jean-Michel Durafour. D'un château l'autre. Les « chambres obscures » de Sade et Pasolini. La Voix du regard : Revue littéraire sur les arts de l'image, 2007. ⟨hal-02068417⟩
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