, Une telle appréciation, si elle met l'accent sur l'influence heideggerienne, ne paraît guère compatible avec la lecture que fait Malick du philosophe allemand? Pour l'homme malickien, la fusion emersonienne de l'ego dans la nature n'aurait donc pas vraiment de sens : la nature est toujours vue depuis une fenêtre, ou mieux depuis un cadre. Days of Heaven est structuré autour de nombreuses références picturales qui ouvrent toujours sur la nature une perspective culturelle : le célèbre House by the Railroad (1925) d'Edward Hopper, bien sûr, que la demeure du fermier reproduit quasiment à l'identique, mais aussi Christina's World (1948) d'Andrew Wyeth (fig. 8), voire plusieurs scènes de champs de Thomas Hart Benton, et j'en passe. Voilà pourquoi tout se passe comme si la nature ne nous, Car, si d'un côté la nature peut paraître omniprésente et référentielle dans Days of Heaven ou The New World (Le Nouveau Monde, 2005), d'un autre côté, peutêtre tout aussi crucial, elle en est singulièrement absente, malgré les plans « panthéistes » nombreux sur la faune et la flore. Il faut revenir, pour le comprendre, à la notion de point de vue, et remonter, à rester dans la sphère philosophique, plus à Heidegger qu'à Emerson

S. Cavell, La Projection du monde, p.13, 1999.

, Anne Cauquelin rappelle d'ailleurs que les Grecs, pour qui la nature était si importante, n'avaient pas de mot spécifique pour désigner le paysage (L'Invention du paysage, p.35, 2000.