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Communication Dans Un Congrès Année : 2012

Les lois les plus contraignantes du monde

Résumé

A côté des lois des hommes, écrites, spécifiques à chaque cité, il existe en Grèce des lois sacrées, non écrites, et communes à tous les Grecs. Ces lois, que l'on rencontre dans les mythes et la tragédie, plus contraignantes que les lois humaines, sont aussi en vigueur dans la société et nous observerons trois lois sacrées sous ce double point de vue : mythe et réel. Le grec dispose de plusieurs mots pour parler des lois : tout d'abord du mot θεσμός, qui a signifié « institution ou loi établie par les dieux, coutume antique », avant de désigner les lois faites par les hommes (les lois de Dracon par exemple à la fin du VII° s. avt JC 1) puis de disparaître au profit de νόμος, loi (notamment loi écrite 2). Il y a aussi le terme νόμιμον employé par l'Antigone de Sophocle qui parle de άγραπτα νόμιμα, « lois non écrites » (v. 454-455). « Je ne pensais pas que tes édits à toi fussent assez puissants pour permettre à un mortel de passer outre à d'autres lois, aux lois non écrites, inébranlables des dieux » (453-455, trad. P. Mazon), dit-elle à Créon après la mort de son frère Polynice et interdiction faite de l'enterrer sous peine de mort. Lois des dieux, donc sacrées, c'est-à-dire beaucoup plus graves à transgresser car rendant l'auteur de la transgression sacrilège. Ces lois appartiennent au premier des trois niveaux d'application de la justice, selon C. Baconicola, c'est-à-dire la « justice imposée directement par les dieux aux mortels 3 », d'où leur caractère contraignant. On connaît par la littérature et les mythes plusieurs lois sacrées (ou lois non écrites) dont certaines ont trait aux relations avec des étrangers (loi d'hospitalité, loi envers les suppliants), mais dont plusieurs concernent les relations familiales, comme l'interdiction de faire couler le sang d'un membre de sa famille ou le devoir impératif pour les enfants de respecter leurs parents âgés (Eschyle, Les suppliantes, 707), de leur rendre les honneurs funèbres (Antigone et Ajax de Sophocle, Les suppliantes d'Euripide) ou encore celui pour les fils de venger leurs pères (Electre) 4. Mais à lire l'ouvrage de Glotz sur La solidarité de la famille dans le droit criminel en Grèce 5 , dans lequel il étudie la solidarité des membres d'un génos (famille au sens large) en matière de justice et de lois, nous nous rendons assez vite compte que les oeuvres littéraires et les mythes reflètent un état de la société. Cela est particulièrement clair lorsque nous avons la chance d'avoir à notre disposition des codes de lois ou des discours prononcés lors de procès, documents on ne peut plus précieux. Par exemple, parmi ses lois, Solon (au tout début du VI° s. avt J.C.) inclut des lois communes à tous les génè et transmises par la tradition : la première est que « le fils est tenu de fournir à ses ascendants vieux ou pauvres les aliments et le gîte » ; selon la deuxième « défense est faite au fils d'outrager ses ascendants dans leur personne ou leur honneur par voie de fait ou injure » et la troisième ordonne : « le fils est tenu de procurer à ses ascendants des funérailles et une sépulture honorables 6 ». Par ailleurs, la distinction entre lois écrites et non écrites existe encore en pleine époque classique, et un grand crédit est 1 Aristote, Constitution d'Athènes, IV, 1. 2 Jacqueline de Romilly, La loi dans la pensée grecque, Les Belles Lettres, 2002, p. 17. 3 Chara Baconicola, « La justice dans la tragédie grecque », dans Mythe et justice dans la pensée grecque, éd. Stamatios Tzitzis, Maria Protopapas-Marneli et Bjarne Melkevik, Presses de l'Université de Laval (Québec), 2009, p. 175. Les deux autres niveaux sont la justice appliquée au plan interpersonnel et le troisième la justice appliquée au plan international. 4 Plutarque, Isis et Osiris, 19, même idée : Horus estime que l'action la plus belle est « de venger son père et sa mère, quand ils ont été indignement traités », traduction M. Meunier. 5 Gustave Glotz, La solidarité de la famille dans le droit criminel en Grèce, Paris, Albert Fontemoing éditeurs,
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  • HAL Id : hal-02095761 , version 1

Citer

Mireille J Brémond. Les lois les plus contraignantes du monde. Lien familial et lien obligationnel, 2012, Aix-en-Provence, France. ⟨hal-02095761⟩
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