, Mais, parmi les femmes philosophes visées par Carlo Gozzi, mérite d'être mentionnée celle que, dans la préface à l'édition publiée, il appelle « la Signora Europa letteraria », Elisabetta Carminer, fille du fondateur du journal L'Europa letteraria, journal culturel neutre au départ, qui changea fortement quand en prit la direction la jeune intellectuelle, disciple des philosophes français 33 . En somme, l'une en creux, par le miroir brisé du contexte royal festif dans lequel elle s'insère, l'autre en plein puisque l'auteur y décharge à la fois son talent et sa bile, La Princesse d'Élide et La Princesse philosophe sont chargées de "marqueurs, Gozzi fustige les "femmes savantes" qui se multipliaient à une époque où l'on essayait de mettre la science à la portée de tous (on pense au Newtonianisme pour les dames de Francesco Algarotti)

, Nommer quelqu'un c'est se l'approprier, dit-on, c'est en tout cas lui donner une identité. La Diana de Moreto porte un nom qui mythologiquement la définit comme le stéréotype de la femme chaste et virile, en harmonie avec l'hostilité à l'amour et au mariage qu'elle professe. La Princesse de Molière n'a pas de nom, mais l'Antiquité dans laquelle elle vit et la chasse au sanglier qu'elle pratique l'identifient à la Diana de Moreto

L. West and . Le-roumain-petrescu-conserveront-À-la-princesse-le-nom-que-moreto-lui-a-attribué, Certes ce nom, qui étymologiquement porte la marque du divin, peut correspondre, par dérision, à une jeune femme "illuminée". Mais c'est aussi le nom de la jeune comédienne pour qui Gozzi écrivit le rôle, Teodora Bartoli Ricci, arrivée depuis peu dans la troupe Sacchi, et que l'auteur avait prise sous son aile 34 . Avec Teodora, explique Gérard Luciani, ce furent six ans de « protection

, La troupe Sacchi était pour Carlo Gozzi comme un petit royaume dont il était le chef et qui remplaçait la famille qu'il n'avait jamais connue véritablement, Conseiller théâtral des jeunes comédiennes », il écrivait pour elles « des rôles adaptés à leur caractère, p.292

, Plus tard, dans ses Mémoires, il évoquera la jeune comédienne comme une femme « pétrie de quintessence et d'ambition, gâtée par les principes d'éducation et les adulations des esprits soi-disant philosophes de notre siècle éclairé » 35 . Le rôle de Diana était, dès le départ, assez proche de la personnalité de Teodora : Gozzi s'efforça de l'y adapter encore davantage, de la même façon que Molière avait en partie façonné le rôle de la Princesse

, Néanmoins, si un auteur-acteur-metteur en scène parle aussi de lui dans ce qu'il écrit, joue et fait jouer, il est évident que Molière a mis une part de lui-même dans le prince Euryale, amoureux d'une femme belle qui ne l'aime point, et dans Moron, le bouffon malheureux dont il jouait le rôle. De même, Gozzi s'est glissé à la fois dans Don Cesare et dans Giannetto 36, le bon sens de ce dernier et dans sa lutte contre la "philosophie

, Si de Moreto à Molière l'écart n'est pas "historique" puisque les deux pièces sont presque contemporaines, et réside essentiellement dans la structure formelle du texte et dans son adaptation à une fête donnée pour la cour de France (tout comme Moreto écrivait pour Philippe IV et le Buen Retiro), avec Gozzi il y a véritablement re-création au service d'une idéologie bien marquée, L'intérêt des deux réécritures que nous avons examinées -qui suivent pas à pas le texte d'origine et qui pourtant sont différentes -réside dans la transposition d'une même intrigue, p.35

. Ibidem, , p.300

G. Si-l'on-en-croit-le-spécialiste-qu'est and . Luciani, tout comme celle de Don Cesare avant qu'il n'ait vu Teodora, la vie sentimentale de Gozzi avait été quasiment vide (op. cit, p.26

, Chez Molière il n'y a pas de vrai vainqueur sinon, au final, la déesse Vénus. Chez Gozzi le vrai vainqueur est Giannetto, le brave, fidèle, sage et plaisant Vénitien, tout à fait digne de remplir, comme il le fait d'ailleurs, les fonctions de « secrétaire et confident » de nobles quelque peu "déboussolés". Riassunto : La commedia dello spagnolo A. Moreto, El desden con el desden (1654), fu il punto di partenza di diverse riscritture europee, fra cui quelle di Molière (La Princesse d'Élide, 1664) e di Carlo Gozzi (La Principessa filosofa, 1772), ou à un public élégant voire frivole, mais à la population de la Sérénissime, une population à distraire et à éduquer