. Achille-de-l'emmener-À-troie, Mais la terrible Armide s'écarte, par sa fureur, de la douce Déidamie. L'enchaînement de ses réactions est étroitement calqué sur le déchaînement de Didon apprenant qu'Énée va la quitter (Én., IV) : toutes deux essaient de retenir leur amant successivement par les larmes, les cris, les supplications, la colère et les menaces, enfin le recours aux pratiques magiques (Didon use des services d'une prêtresse capable d'invoquer les puissances infernales) ; toutes deux tombent évanouies, émeuvent leur amant, reçoivent de la part de ce dernier des invitations à « aller en paix » ; mais toutes deux se heurtent à une volonté inexorable : Didon se suicide, Armide jure de se venger, Eh bien, allons, emmène-moi à ta suite ; pourquoi ne portraisje pas avec toi les étendards de Mars ? »)

. Calypso, Ainsi Armide est-elle une figure complexe, fruit d'éléments mythiques croisés. Schématiquement : Circé + Déidamie + Didon = Armide. Quant à Ulysse, son rôle est successivement joué par Renaud, Ubaldo, puis à nouveau Renaud ; plus exactement, dans la dernière étape, Renaud, son rôle d'Achille terminé, est un mélange d'Énée et d'Ulysse 17 . C'est grâce à Renaud, tour à tour Achille et Ulysse christianisés, que la forêt sera désenchantée et Jérusalem reprise. Au chant XVIII nous le voyons triompher des fantômes, des monstres et des arbres ensorcelés de cette forêt. Les nymphes ont beau se transformer en cyclopes, il triomphe. Ce sont toutefois de curieux cyclopes, pp.118-136

, Ajoutons que, quand Ulbaldo incite Renaud à écouter Armide afin d'éprouver la force de son âme, c'est en ces termes : « qual più forte di te se le sirene / vedendo ed ascoltando

, Nous avons marqué une certaine insistance sur la construction de la figure d'Armide et sur le rôle joué, de ce fait, par Renaud, car cet épisode de La Jérusalem délivrée aura, dans la suite de l'histoire d'Ulysse en Italie, une notable importance : Le Tasse était parti du schéma Circé-Ulysse pour

. Armide, Angelini et musique de Giuseppe Zamponi, 1650 ; Circe abbandonata da Ulisse, livret de Aurelio Aureli et musique de Bernardo Sabatini, 1692, qui devint, en 1702, La magia delusa, avec musique de Carlo Francesco Pollarolo ; en France, Circé, livret de Madame Gillot de Saintonge, musique de Desmarets, 1694 ; en Italie à nouveau, Circe delusa, livret de G.A. Falier, musique de Giuseppe Boneventi en 1711, puis de Antonio Orefice en 1713), et ce glissement d'un personnage à l'autre se vérifiera, Certains poètes des siècles suivants effectueront l'opération inverse, mais sans libérer Armide de sa « couche Didon ». Si bien que des opéras, notamment aux XVII e -XVIII e siècles, offriront des «, 1934.

, Godefroy attend le précieux secours d'une armée danoise. Mais il craint que le perfide

, Et l'empereur a promis d'autres aides, qui n'arrivent pas ; aussi le messager devra-t-il rester avec le monarque a procurar l'aiuto, che già più d'una volta a noi promesso, e per ragion di patto anco è dovuto

, Plus tard Godefroy, pour encourager son armée, évoquera les mille dangers déjà surmontés et, parmi ceux-ci, « i greci inganni

L. Bien-sûr, . Tasse-s'est-inspiré-des-chroniqueurs-des-croisades-;-Évoquer-le-nom-de-guilaume-de-tyr, and . La-troisième-croisade, Historia belli sacri verissima, et qui certes n'est pas tendre envers les empereurs d'Orient et leurs sujets, reprenant les griefs déjà énoncés par ses prédécesseurs. La tendance est à noircir et à taxer de traîtrise les Grecs et leur chef suprême. Le premier récit de Croisade qui nous soit parvenu, et que Le Tasse a pu connaître car l'auteur (anonyme) est originaire d'Italie méridionale, Gesta Francorum et aliorum Hierosolimitanorum, écrit par un homme qui participa effectivement à l'entreprise, ne cesse de dénigrer le malheureux Alexis Comnène, constamment dénommé « le misérable empereur », « l'inique empereur », « l'empereur, plein de vanité et de malveillance », vol.19

, Histoire anonyme de la première Croisade, éditée et traduite par Louis Bréhier, vol.258, 1924.

, dont les participants embarquaient à Venise, le doge fit donner l'assaut à Zara, puis à Constantinople, qui fut mise à sac. Le chroniqueur Robert de Clari raconte que, le dimanche qui précéda l'assaut, « les évêques prêchèrent des sermons au travers du camp [?] et montrèrent aux pèlerins que la bataille était légitime car les Grecs étaient traîtres et meurtriers [?] ils étaient pires que les juifs. Les évêques disaient qu'ils absolvaient, de par Dieu et le Pape, tous ceux qui donneraient l'assaut ; et les évêques demandèrent aux pèlerins de se confesser et de communier fort bien, et de ne pas avoir peur de donner l'assaut aux Grecs, Les choses ne firent que s'envenimer lors des Croisades qui suivirent, et atteignirent leur paroxysme en 1203 quand, profitant de la quatrième Croisade, 1982.

, il y a la présence, depuis des siècles, de colonies grecques dans la péninsule et en Sicile (le Sud de l'Italie fit partie, jusqu'au XI e siècle, de l'empire d'Orient, et des noyaux de populations grecques y étaient demeurés), avec qui les rapports n'étaient peut-être pas toujours excellents ; il y a à Rome la présence du Pape, représentant de l'autorité religieuse, qui se voit offensé par l'irrédentisme des populations grecques et la fermeté des patriarches (aucun concile n'arriva jamais au but recherché, à savoir l'union des deux Églises, à cause de l'entêtement des deux parties) ; avec ses colonies d'Orient, la Crète en particulier ; quant aux actes de piraterie perpétrés par les Turcs sur les côtes italiennes, ces derniers occupant, depuis un siècle, toute la Grèce, une assimilation avait dû immanquablement se faire, dans l'esprit des populations, entre occupants et occupés. D'où une notable défiance, de la part de l'Italie, vis-à-vis de la Grèce, défiance scellée à jamais par le trait railleur lancé à Godefroy par Alete : « La fede greca a chi non è palese ? », qui est devenu un véritable proverbe (aujourd'hui encore le dictionnaire Palazzi mentionne : fede greca = slealtà, falsità), tandis que d'autres proverbes, moins littéraires, sont bien le témoignage d'ataviques frictions (« Greci, senza fidi », dit-on en Sicile, un acte de foi désintéressé 21 . Mais à l'époque où Le Tasse écrit, ce sentiment d'hostilité demeure très fort : les vers acerbes contre la Grèce de son temps, esclave des Turcs, cités plus haut en témoignent. Multiples en sont les raisons, lesquelles, pour la plupart, sont spécifiques à l'Italie : outre les motifs littéraires que nous avons déjà signalés (Virgile), vol.22

, Cette défiance était d'ailleurs apparente chez l'Arioste (et chez son prédécesseur, Boiardo), qui, dans le Roland furieux, dès le départ marquait sa position en faisant des ducs d'Este les descendants d'Astyanax, fils d'Hector, échappé par ruse à Ulysse et aux « agguati tesi, XXXVI, §60), et mettait en doute la vérité des faits exposés par Homère (XXXV, §27)

. L'analyse and . Dans-le-poème, Comme dans La Jérusalem, nous voyons les Grecs entrer en scène. Ils apparaissent à la fin du Poème pour troubler la fête et compromettre le bonheur imminent de Roger et Bradamante : soucieux d'un brillant mariage, les parents de la jeune guerrière promettent la main de leur fille à Léon, fils de l'empereur de Grèce. C'est là le point de départ d'une nouvelle série d'exploits dont Roger est le héros et qui mettent en relief combien les Grecs, et en premier lieu leurs souverains, sont perfides, lâches, calculateurs, sans scrupules, prêts aux ruses les plus honteuses pour gagner, des schémas empruntés aux épopées antiques amènerait à des conclusions à peu près analogues à celles décelées chez Le Tasse

. De-costanzo and . Empereur, une ruse honteuse, induisait Roland et son ami à partir, afin d'assurer la victoire du tournoi à ses propres champions : « Il Greco, che era di malizia pieno / (Come son tutti de arte e de natura)? », généralisait ainsi Boiardo. Partant, il n'y a plus lieu de s'étonner si, dans le Roland amoureux, apparaissait déjà le dédoublement du représentant par excellence des Grecs, Ulysse, les épisodes positifs étant repris (certes, souvent de manière caricaturée) par des personnages positifs, et ceux mettant en relief quelque perfidie par des personnages négatifs

. Cf and . Notamment-ferdinand-chalandon, Essai sur le règne d'Alexis 1 er Comnène, vol.346, 1900.

L. Bréhier, A. Le-monde-byzantin, and . Michel, , vol.1, 1947.

G. Relevés and . Pitrè, VIII-XI de la Biblioteca delle tradizioni popolari siciliane, Proverbi siciliani, p.1880